Sur quelle base juridique la « communauté internationale », tout particulièrement la CEDEAO, fonderait-elle l’attaque militaire contre la Côte d’Ivoire, qu’Alassane Ouattara ne cesse d’appeler de ses vœux ?
Noble Amoani-Koto, juriste ghanéen interrogé par l’Agence ghanéenne de presse (GNA), est formel. Toute initiative de la CEDEAO visant à renverser le président Laurent Gbagbo par la force, serait illégale, au regard du droit international. Premièrement, parce qu’elle battrait en brèche le principe de non-intervention dans les affaires intérieures des pays, sanctifié par de nombreux textes.
Noble Amoani-Koto met en avant l’article 51 de la Charte des Nations unies, qui sanctifie, d’une certaine manière, la notion de « légitime défense » pour les pays attaqués. Un article qui stipule qu’« aucune disposition de la présente Charte ne porte atteinte au droit naturel de légitime défense, individuelle ou collective, dans le cas où un Membre des Nations Unies est l'objet d'une agression armée… ». La Côte d’Ivoire aurait donc le droit de se prémunir d’une attaque de la CEDEAO, surtout dans le cas où elle n’est pas sanctifiée par le Conseil de sécurité de l’ONU, qui ne s’est, bien entendu, jamais prononcé pour une offensive militaire au pays d’Houphouët-Boigny.
Le juriste ghanéen s’appuie aussi sur le pacte de non-agression et le protocole d’assistance mutuelle qui indiquent clairement que la CEDEAO n’a le droit d’utiliser la force qu’en cas d’une attaque militaire contre un ou plusieurs Etats membres. L’article 18 du Protocole de non-agression interdit aux forces de la CEDEAO d’intervenir dans un pays membre tant que le conflit demeure interne à ce pays. Ce qui est le cas de la crise postélectorale ivoirienne.
Noble Amoani-Koto met aussi en exergue les articles 52 et 53 de la Charte des Nations unies pour démontrer l’illégalité du projet de la CEDEAO – qui aurait déjà, si l’on en croit Alassane Ouattara, commencé des manœuvres à Bouaké. Si l’article 52 reconnaît la validité des accords régionaux – « aucune disposition de la présente Charte ne s'oppose à l'existence d'accords ou d'organismes régionaux destinés à régler les affaires qui, touchant au maintien de la paix et de la sécurité internationales, se prêtent à une action de caractère régional, pourvu que ces accords ou ces organismes et leur activité soient compatibles avec les buts et les principes des Nations Unies » –, mais l’article 53 subordonne toute action militaire dans le cadre d’institutions régionales à l’approbation du Conseil de sécurité – « aucune action coercitive ne sera entreprise en vertu d'accords régionaux ou par des organismes régionaux sans l'autorisation du Conseil de sécurité ». « Il est invraisemblable qu’une résolution de cette nature soit validée par le Conseil de sécurité », explique M. Amoani-Koto. Qui propose que les options maximalistes – notamment la reconnaissance de Ouattara comme président par la CEDEAO – soient abandonnées au profit de négociations sur un recomptage des bulletins de vote, une reprise du scrutin ou un accord de partage du pouvoir.
Au final, il semble évident que le concept d’utilisation de la « force légitime » brandi par le camp Ouattara cache mal un projet : la tentative de donner un habillage légal au soutien actif que de nombreux pays ouest-africains ont accordé à la rébellion depuis le 19 septembre 2002, pour le compte d’un seul commanditaire : la France officielle.
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